Sur les traces des vigognes
Dimanche 18/07 : Nazca – La montagne, 31 kms
Après un petit déjeuner particulièrement copieux mijoté par Fernando, nous voici partis comme d’hab. bien tard, le temps de dire les adieux à tout l’hôtel et d’acheter du pain.
Il est 11h00 lorsque nous sortons de la ville de Nazca, animée ce jour là par une fête locale tout en musique.
Un faux plat grimpant de fond de vallée nous permet de nous échauffer et nous percevons très vite la chaleur, dont Marc et Léa ne tardent pas à souffrir.
7 kilomètres plus loin, la route se cabre sous nos roues ; nous tentons en vain de la dompter mais il faut nous faire à cette réalité. Pour nous motiver, nous dégageons les points positifs du moment : peu de circulation, comparé à celle de la Panaméricaine, ce qui rend le parcours calme et agréable, l’air est pur. Le bitume est d’excellente qualité, une petite brise nous souffle dans le dos, le Pérou en quelque sorte !
Toutefois, les enfants commencent à se plaindre.
Grâce à notre formation acquise auprès de nos amis cyclotouristes Jean-Yves, Guy, Corinne, Jean-Louis, Gigi, Christophe, Zouzou, nous mettons en place des techniques de grimpe redoutables et efficaces. Nous optons pour une stratégie alternant pour Léa et Tim 1km de marche, enfin de jeu dans le caniveau, avec 1 km sur le vélo et ça marche.
Nous progressons lentement mais sûrement et en chansons.
Afin d’éviter de porter trop lourd en eau, nous formons les enfants à quémander de l’eau aux automobilistes et camionneurs qui nous doublent et nous obtenons ce qu’il nous faut, voire plus. Les gens sont vraiment sympas et semblent heureux de participer à notre confort, par leur générosité. D’autres nous proposent des fruits, ou autres denrées qui font le bonheur des enfants et le notre.
L’heure tourne et nous sommes contraints de s’arrêter de pédaler pour installer notre premier campement, à l’écart de la route, à 1600 mètres d’altitude.
Etait-ce une décharge ou un dévidoir de WC ? Seule une étude balistique pourrait déterminer l’usage de ce lieu. Quoiqu’il en soit, les premières traces nous mettent dans l’impatience de rencontrer les vigognes.
Léa et Tim sans doute pas assez fatigués, se dépensent en jouant au foot avec un beau gros caillou rond en guise de ballon, inventent la course des 200 secondes, le lancer de boulet.
Le coucher de soleil nous émerveille, le ciel étoilé est d’une pureté pure.
Lundi 19/07 : La cordillère – LaCordillère, 33 kms
Après une nuit correcte, nous partons à 8h30, ce qui est un exploit. Nous continuons notre stratégie, alternant marche à pied et pédalage pour les enfants.
Les employés de la route se soucient de notre sécurité en nous donnant des conseils (attention aux camions dans les virages, à leur vitesse etc, nous donnent de l’eau.. Nous traversons le village de Huallhua et pique niquons à un km au dessous d’un resto, c’est ballo.
Nous montons bien, les enfants sont courageux, mais ce jour là l’objectif fixé est trop ambitieux. Pas de coin pour dormir, il nous faut encore avancer mais la fatigue est là, et la nuit arrive. Nous sommes contraints d’installer notre campement en bordure de route, entre ravin et barrière de sécurité.
Inutile de préciser que nous passons une très mauvaise nuit et que ce ne sont pas les pâtes qui nous ont redonné du peps car le réchaud ne fonctionne plus. Nous faisons appel aux personnes qui connaissent ce matos car le réchaud MSR ne fonctionne plus.
Mardi 20/07 : La Cordillère – Réserve de Pampa Galeras, 30 kms
La journée de la veille a été harassante, et la nuit pas reposante. C’est donc sur ces bases là que nous reprenons la route. Point positif, le réveil est facile puisque nous ne dormons pas et le départ à 7h30 est un record. Après un petit dej. sobre mais avec une petite boite de lait dont Léa et Tim se régalent, nous découvrons que nous nous sommes trompés dans nos calculs et qu’il nous reste en fait que 29 kms (au lieu de 39) avant d’atteindre la réserve de Pampa Galeras. Toutefois c’est dur, dur, dur. L’altitude se rajoute à la fatigue, chaque kilomètre est une épreuve.
Malgré le soleil rayonnant, il commence à faire froid. Nous pique niquons à 3600m et débouchons sur la pampa en début d’après-midi et croisons les premières vigognes, ce qui nous décentre de notre difficulté et nous ravit.
Un petit vent dans le dos et quelques centaines de mètres de plat nous permet d’arriver au musée de la réserve vers 15h00. Notre Timou a le mal des montagnes, maux de tête et vomissements.
Nous sommes accueillis chaleureusement malgré le froid par le personnel travaillant pour la réserve. Du maté de coca, et un dortoir nous sont offerts. Nous préparons un remède homéopathique.
Nous prenons le temps de visiter le musée, guidés par une des gardes. Nous découvrons tous les animaux qui vivent sur cette pampa et surtout la vie des vigognes. Elle nous explique la « chaccu », la capture des vigognes pour les tondre afin de récupérer leur fibre
Nous allons manger au resto en face du musée, ce qui représente une première immersion dans le Pérou profond. Nous sommes invités à nous installer à l’unique table de la maison, là où le père de famille s’évertue à couper à grands coups de hachoir mal aiguisé, de scie mal affûtée, un morceau de carcasse de porc. Ca cogne, ça craque et nous sommes un tantinet impressionnés. Léa et Tim se blottissent contre nous et nous tentons de les convaincre, et nous au passage, que tout va bien se passer. Nous ne nous sentons pas spécialement prêts, à cet instant là, pour manger de la viande et optons pour un œuf avec du riz et un maté de coca. C’est plus sûr.
De retour dans le dortoir, la température a déjà atteint les 6°C, et nous nous glissons dans nos sacs à viande en thermolite et nos duvets, avec cagoule et gants de soie.
Mercredi 21/07 : Réserve de Pampa Galeras – Puquio, 70 kms.
Les enfants dorment bien, Tim se réveille en disant « j’me sens mieux ».Ouf ! Plus de maux de tête. Il fait 7°C. Sortir des duvets est inconfortable, enfiler nos habits tout froids l’est tout autant. Nous allons prendre un petit déj. dans la famille péruvienne de l’autre côté de la route.
Beaucoup d’hommes arrivent de part et d’autre, soit pour manger, soit pour acheter des provisions avant de partir participer à la « chaccu ». Ca va, ça vient et nous sommes là au milieu en train de manger une soupe pour nous et riz, œuf pour les enfants, avec le maté de coca pour supporter l’altitude.
Mais qu’est ce que la « chaccu » ? Nous comprenons que c’est une technique de capture des vigognes afin de les tondre, puis elles sont relâchées. Cela dure de mai à octobre et il faut une trentaine d’hommes chaque jour. La laine des vigognes est ensuite vendue et rapporte son pesant d’or à la communauté.
Départ 10h. La route continue de monter lentement, difficilement de part l’altitude et la raréfaction de l’oxygène, les vigognes nous accompagnent, c’est beau. Nous arrivons enfin à la limite de la réserve, donc de la montée à 4153m d’altitude.
Nous sommes émus et bouleversés par ce que nous venons d’accomplir, par ce que nos enfants ont su surmonter et nous les en remercions et félicitons vivement.
La descente est très agréable, elle nous procure cet immense sentiment de liberté, de fierté et de plaisir.
Fini la pampa, nous découvrons un paysage alpestre. Plus on descend, plus la végétation est diversifiée (conifères, eucalyptus, herbe), d’autres animaux paissent de part et d’autre de la route (ânes, cochons, vaches, moutons, brebis, chèvres, alpagas, papillons).
En fond de vallée, à 3200m, nous pique niquons dans un endroit bucolique au bord de la rivière, ce qui nous procure à tous les 4 un moment de détente fort apprécié.
Mais ne nous endormons pas, la journée n’est pas finie et nous voulons arriver à Puquio ce soir. Nous sommes de nouveau confrontés à une montée interminable vu ce que nous avons déjà dans les jambes. Nous traversons Lucanas sans nous y arrêter, nous nous accrochons pour les 19 kms suivants et abordons la descente salvatrice qui nous conduit à Puquio.
La traversée du village est royale, les habitants nous encouragent et nous accompagnent jusqu’à l’hôtel Sarita, où nous trouvons un repos bien mérité, après un pollo con papas fritas.
Jeudi 22/07: Repos.
Grasse matinée.
Pour la lessive, une péruvienne nous propose de nous la faire. Nous partageons la tâche ensemble et lui offrons quelques soles qu’elle apprécie les yeux brillants.
Nous prenons un petit déjeuner au restaurant « La Estancia » tenu par un couple âgé et chaleureux.
Le cadre est apaisant, familial, propre et fleuri, ce qui contribue à notre bien-être. Salomon nous présente un guide touristique qui nous donne des indications indispensables sur les dénivelés à venir.
Déambulation dans la ville, achat d’un bonnet en laine pour chacun, courses pour 3 jours de route.
De retour à l’hôtel, nous avons la surprise de voir arriver Nicole et Heinz, 2 valeureux suisse allemands cyclopèdes, harassés par leurs efforts de la journée. Ils font le même trajet que nous, jusqu’à Cusco mais prévoient de se reposer trois jours avant de repartir.
Nous décidons de partager notre repas du soir afin de nous raconter nos aventures, en français, en allemand, en anglais et en espagnol. En attendant ils vont se reposer et nous, visionner un film, tous les 4, dans la chambre. Merci Philippe et Pascal pour la provision de films mise sur notre net book.
Après la soirée avec Nicole et Heinz, nous bouclons les sacoches pour partir le lendemain pour un nouveau périple en montagne, qui nous conduira, en 314 kms, à Abancay.